Les premières rencontres
L’idée de l’association est née en 2014 de la rencontre de plusieurs personnes habitant dans le sud-est de la France : un décortiqueur de petit épeautre, deux ingénieurs travaillant sur la valorisation des balles dans le secteur du bâtiment, un spécialiste de la construction écologique, un enseignant dans un lycée professionnel et une personne ayant consacré sa vie à la riziculture camarguaise.
Pour faire la passerelle entre deux secteurs d’activités, il fallait bien comprendre les besoins, les contraintes et les habitudes des uns et des autres. Travailler de concert s’imposait comme une évidence pour porter plus loin le travail porté par chacun, pour le crédibiliser aux yeux de tous.
L’idée d’une structure dédiée à la valorisation des balles/cosses/coques s’est rapidement imposée dans les discussions. Des premières maisons ossature bois préfabriquées et isolées en balle de riz avaient déjà vu le jour dans les Haute Alpes (entreprise Bonnefont). L’heure était venue d’avancer ensemble.
Les usages envisagés pour les balles étaient à l’origine liés à l’isolation en vrac, aux bétons allégés, aux enduits en terre crue ainsi qu’en décoration (panneaux thermocompressés), sans pour autant savoir quelle valorisation tirerait son épingle du jeu.
Parmi les six fondateurs de l’association, trois sont toujours impliqués dans le fonctionnement de l’association : Etienne Mabile, Jean-Marie Haquette et Pierre Delot.
La création de l'association
« Bâtir en Balles » a été créé en 2015, en s’inspirant du modèle proposé par le RFCP (Réseau Français construction Paille), dont certains cofondateurs de l’association étaient et sont toujours adhérents. La paille et les balles proviennent des mêmes champs. Notre organisation s’adapte au matériau.
Il nous est rapidement apparu nécessaire d’agir à l’échelon national puisque personne ne travaillait sur le sujet et que les balles/cosses/coques étaient présentes sur tous le territoire, et non pas uniquement dans le sud-est.
Les premières années pour convaincre
Une association jeune doit fonctionner sans budget, en bénévolat intégral, et doit limiter tous ses frais. En plus du travail de retour d’expérience, de synthèse, de création d’un site internet pour compiler l’information, il nous a fallu travailler sur la qualité des balles pour les amener à un standard compatible avec de nouvelles valorisations.
Si on se compare notre travail à celui mené par le RFCP sur la botte de paille, nous avons un travail supplémentaire à réaliser. Avec la paille, la ressource, c’est la botte, elle est déjà là, elle est déjà produite et utilisable en l’état, et il faut « juste » faire un contrôle qualité. Avec les balles, la ressource, c’est ce qui sort du décorticage, mais elles ne sont pas utilisables en l’état. Il faut les amener à un niveau de qualité compatible avec un usage en isolation.
Le premier chantier à mener était de faire un état des lieux sur la ressource, ce qui s’est traduit par une collecte de balles (la plupart non nettoyée), chez de nombreux décortiqueurs, partout en France, au fil des années. Ceci a permis de définir les contours de ce qu’est une balle « de qualité » et la manière dont pourrait être contrôlée cette qualité. Ce travail a conduit au fil des années au contrôle qualité tel qu’on peut vous le présenter aujourd’hui.
En parallèle de cet état des lieux, il a fallu porter un message parfois difficile à entendre pour les décortiqueurs, à savoir qu’il restait des grains dans leur balle, parfois beaucoup, et que les récupérer en nettoyant la balle pourrait être économiquement intéressant. Sur le papier, c’est beau, mais nouer une relation de confiance prend du temps et la question de l’investissement à réaliser, évidemment à la charge des décortiqueurs, n’était pas résolue, sans parler du marché à créer …
Pour dérisquer l’investissement nécessaire, c’est auprès des financeurs publics qu’il fallait travailler (et qu’il nous faut encore aujourd’hui travailler) pour qu’ils perçoivent la pertinence de notre projet et la nécessité de subventionner des installations d’unités de nettoyage des balles chez les décortiqueurs. Nous n’étions pas en 2022 et ses 35/40°C en juin. Sortez les rames !
C’est en région Paca que la situation s’est débloquée en 2018, à la suite du résultat de la réalisation d’un SRB (Schéma Régional Biomasse) dont les conclusions était que les trois agroressources suivantes méritaient d’être fléchées vers une valorisation en écoconstruction : la paille de blé de Camargue, la paille de riz de Camargue et la balle de riz de Camargue. Ceci a conduit à la création de la première unité de nettoyage de balle de riz, chez Balle Concept, grâce à une subvention régionale. Cette étape a été essentielle dans notre projet. Nous n’avions plus à convaincre !
Les années suivantes pour ancrer les balles dans le paysage
L’association a rejoint le CF2B (Collectif des filières Biosourcées du Bâtiment) en 2017 en tant que filière émergente. Au contact des autres filières, nous avons notamment pu trouver des fonds pour écrire des fiches de préconisation de mise en oeuvre, mettre en place des premières formations destinées aux futurs professionnels de l’écoconstruction, …
A l’instar de la construction paille, nous nous consacrons d’abord aux mises en oeuvre dans la construction neuve. En effet, en rénovation, les cas de figures sont trop nombreux à traiter et le marché subventionné ne laisse guère leur chance aux matériaux non industrialisé. La technique qui s’est dégagée sur les chantiers est l’isolation « à plat ou presque » (planchers, toitures terrasses et toitures).
Nous avons aussi pu finaliser le protocole de contrôle qualité, créer une nomenclature produit, créer des calculatrices en lignes, créer un annuaire cartographique, caractériser finement la balle de riz grâce à des aides publiques (2021), refaire le site internet, …
Penser à l'avenir
La charge de travail augmente chaque année (équivalente à un mi-temps sur 2020 et 2021). Pour grandir, il est désormais nécessaire de sortir progressivement d’un fonctionnement en bénévolat. Le modèle économique reste à inventer. Il sera sans doute basé sur une contribution équitablement répartie entre les décortiqueurs et les entreprises du bâtiment.
En plus du travail déjà réalisé et à poursuivre, énormément de choses nouvelles restent à faire : convaincre de nouvelles régions et de nouveaux décortiqueurs, caractériser les matériaux, créer des formations vidéos, créer une dynamique interfilière autour des « granulats vrac et fibres courtes » pour harmoniser les pratiques et mutualiser les formations, …
Si vous avez envie de vous investir, votre énergie, vos compétences dans tous les domaines, votre présence dans les régions, … nous permettrons de faire avancer le choses partout en France.